Réflexions sur la mort

Auteur: Délia STEINBERG GUZMAN

libéré 26-02-2018

L’auteur s’interroge sur le sens de la mort. Pour certains elle est un châtiment, pour d’autres une transformation, pour d’autres encore l’accès à l’éternité.

Au niveau rationnel, personne n’ignore le fait de la mort et nous savons tous que, tôt ou tard, elle viendra nous prendre sans exception. Mais, pour la même raison qui fait qu’elle est entourée de quelque chose de magique et de beaucoup d’ignorance, nous avons tous peur de la mort et préférons la fuir de la seule façon possible : en n’y pensant pas.

Sans doute, depuis que l’Homme est capable de se souvenir et de mettre par écrit sa propre histoire, la mort a été l’objet de spéculations, qu’elles soient métaphysiques, mystiques, religieuses, philosophiques, morales, sociales, scientifiques … Sa réalité, son inexorabilité ont préoccupé les hommes de tous les temps, peut-être pour cette raison : parce qu’elle est réelle, qu’elle nous atteint tous et que personne ne lui échappe.

La mort, un châtiment ?

Considérée de façon superficielle, la mort est comme un mal inévitable, guère moins qu’un châtiment, de Dieu pour ceux qui se disent religieux, de la Nature pour ceux qui se disent athées. Pour les premiers, Dieu retire la vie de la même façon qu’il la donne, de façon inexplicable pour notre entendement. Pour les seconds, la Nature s’alimente des êtres vivants et les transforme en déchets quand elle ne peut plus s’en servir.

La science étudie par l’intermédiaire de la physique et de la chimie l’usure progressive des organismes. La sagesse populaire affronte la vieillesse comme une maladie incurable, sans cesser toutefois de chercher des solutions « miraculeuses ».
De son côté, la métaphysique, comme philosophie de l’Être, donne et a donné des réponses qui n’ont pas toujours été convenablement considérées parce qu’elles demandent une grande concentration mentale et spirituelle, car elles rompent avec beaucoup de tabous acceptés aveuglément et qu’elles exigent un dépassement personnel qui demande patience, persévérance et une conscience bien éveillée.

La mort, une transformation

La mort ne peut être un châtiment. Châtiment de quoi ? Peut-on châtier la vie par la mort ? Pas plus qu’elle ne peut être une simple usure vitale et énergétique parce que la Nature est un maître prodigieux dans l’emploi et l’économie de l’énergie ; dans tous les cas, elle nous démontre comment l’énergie se convertit et traverse les plans de l’existence, visibles ou non à nos yeux.
Il ne convient pas de l’interpréter comme une maladie, car aux dires des Anciens la maladie est un manque d’harmonie et d’équilibre, et dans la mort existe une forme d’équilibre, autre conception de l’harmonie, même si le corps physique se désintègre.

Les lois de la vie nous montrent comment les choses vont se transformant et évoluant progressivement ; les formes extérieures varient autour d’un axe ferme et immobile. Et quel est l’axe immobile de l’homme ? Où réside cette essence qui résiste aux changements et les relie en les assumant comme un ensemble d’expériences ?

Peu importe le nom qu’on lui donne : il y a quelque chose en nous, dans les humains, et logiquement dans tout ce qui existe, qui proclame à grands cris son éternité. Parfois en nous faisant fuir la mort, parfois en nous faisant boire la vie comme un nectar délicieux, parfois en nous perpétuant à travers des enfants ou des œuvres, parfois en thésaurisant sur le passé ou en rêvant l’avenir. Ce serait une plaisanterie inutile du destin que nous puissions concevoir l’éternité si nous n’avions pas cette même éternité au plus profond de notre être.

Dormir … rêver longuement… mourir … être sous une autre forme, mais être intensément jusqu’à rompre l’obscure barrière de l’ignorance, la peur inhibante et qui réduit à l’état animal. S’étendre jusqu’où nous ne sommes encore jamais parvenus, vivre comme nous n’avons jamais vécu avant, sentir et penser sans obstacles, avancer sur des chemins impossibles, briller de la lumière du Mystère … La mort ? Qui sait… !

Traduit de l’espagnol par Catherine Laurant

N.D.L.R. : Le chapeau et les intertitres ont été rajoutés par la rédaction

Article paru dans la revue 124 (mars-avril 1992)

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